Les Soft Skills favorisent les Bullshit Jobs
Dans son bestseller Antifragile, Nassim Taleb recommande de revenir à "l'Homo Faber".
De même, le "gourou de la Silicon Valley" Naval Ravikant écrit "Notre planète abrite près de 7 milliards d’individus. J’espère qu’un jour elle abritera près de 7 milliards d’entreprises."
Parallèlement, David Graeber, dans son livre Bullshit Jobs, estime à 40% la part minimale des Bullshit Jobs dans nos économies.
Et il est frappant de voir que la première puissance économique mondiale est désormais la Chine, qui a été décrite ces dernières décennies comme "l'atelier du monde."
Tout semble donc concourir à la promotion d'un changement dans les choix professionnels, et à un retour à "l'Homo Faber".
Mais à notre époque, en partie caractérisée par ce qui est appelé "l'économie de l'information", en tant que 4ème catégorie de métiers (outre ceux des activités primaires, secondaires, et tertiaires), comme exposé dans l'ouvrage de Graeber, nous pouvons nous interroger sur ce que sont les activités qui correspondent à un "Homo Faber".
Évidemment, les travaux manuels et d'artisanat traditionnels en font partie. Mais pas uniquement. Les activités qui permettent de manipuler et transformer, par son action directe, le Réel, pour en proposer un "produit", pourraient en faire partie également.
Mais serait-ce vrai pour toute transformation du Réel ? A priori : non. Car les activités actuelles de "Management" qui consistent essentiellement en "réunionites" ne sauraient, a priori, correspondre à la logique de l'Homo Faber. Même si, dans ce cas, la manipulation et la transformation du Réel sont bien présentes. Pour quelle raison alors souhaitons-nous exclure ce cas ?
Est-ce parce que le Réel transformé consiste essentiellement en "relations humaines" ? A priori : non. En effet, les psychologues, les coachs... œuvrent aussi, eux-mêmes et par une action directe, à un "produit nouveau et transformé", qui est un individu. Quelle différence donc avec le Manager d'équipes visé ci-dessus ?
La différence semble être que ses maître-mots sont "la délégation", "la coordination" et "l'animation". Il fait faire. Il travaille directement, voire indirectement, "sur" des Homo Faber. Et cela est donc insuffisant pour être lui-même qualifié d'Homo Faber.
Or, ces situations semblent nécessiter essentiellement, selon les entreprises actuelles, des dites "Soft Skills". Le présupposé est qu'elles,aideraient à mieux "inter-agir relationnellement" dans toutes ces situations.
Nous arrivons donc à l'hypothèse, légèrement polémique, suivante : les Soft Skills sont corrélées aux non-Homo Faber, et sont donc corrélées aux Bullshit Jobs.
Une seule conclusion prévaut à ce stade néanmoins, bien qu'elle ne relève peut-être plus de la conviction que de la démonstration : Dirigeants, ou Consultants, un des principaux critères d'évaluation d'une décision ou d'une recommandation doit être de vérifier qu'elles tendent bien, effectivement, à diminuer le niveau de Bullshit, en interne ou en externe.
Credit Photo : Sander Sammy